Atelier presse écrite avec Louise Bartlett
Groupe élève du lycée professionnel de l’Édit de Roussillon
Les IST se transmettent par contact sexuel. Elles peuvent avoir un impact sérieux sur la santé. Karl Kubat, infirmier et sexothérapeute au CeGIDD* de Vienne répond à nos questions
C’est quoi un sexothérapeute ?
KK : C’est quelqu’un qui a une formation complémentaire à son métier d’origine : on n’est pas uniquement sexothérapeute, on est d’abord médecin, sage femme, psychomotricienne, psychologue ou infirmière par exemple. On suit une formation de 3 ans à la fac de médecine, pour obtenir un diplôme interuniversitaire (DUI). Ensuite, en tant que sexothérapeute, on va recevoir des gens qui viennent pour une demande d’information, ou avec des préoccupations ou difficultés liées à la sexualité.
Pourquoi vous êtes devenu sexothérapeute ?
KK : Je suis arrivé au CeGIDD en 2011 et je me suis aperçu au bout de quelques mois qu’on ne me parlait que des maladies, du préservatif… On parlait de la sexualité sous l’angle des risques et jamais sous l’angle du plaisir ou de la satisfaction sexuelle. J’ai compris que le bon sens et ma formation d’infirmière ne suffiraient pas, et j’ai décidé de me former.
Quel problème voyez-vous le plus ?
KK : J’hésite… Les violences sexuelles. Et puis après, des gens qui viennent simplement pour parler sexualité, pour comprendre des choses. Ils n’ont pas vraiment de demande précise, ils ont simplement besoin de parler, d’avoir un espace de parole à propos de la sexualité.
Qu’est-ce que vous dites aux gens ?
KK : Je leur dis d’être plus indulgents avec eux-mêmes. Les gens sont souvent durs avec eux-mêmes, très sévères.
Quel accompagnement proposez-vous ?
KK : Je propose des rendez-vous gratuits d’une heure. Au départ, les gens ne viennent pas exprès au CeGIDD pour me voir. Je les rencontre à l’occasion d’un dépistage : certaines personnes vont me parler spontanément, mais la plupart du temps, si je sens qu’il y a une difficulté, c’est moi qui vais demander ‘comment va votre sexualité ?’, et proposer un rendez-vous de sexologie pour se poser et en parler.
Vos clients sont-ils plutôt âgés ou jeunes ?
KK : La plupart de mes consultants sont des hommes. Le plus jeune doit avoir 17 ans et le plus âgé 74. La moyenne d’âge est 20 ans. C’est plutôt des jeunes que je vois.
Qu’est-ce que vous aimez dans ce métier ?
KK : Très bonne question ! Je me sens utile. C’est une discipline très variée, très riche. Ce qui me passionne c’est les gens, et j’ai l’impression de mieux comprendre les gens grâce à ce métier.
Quel patient vous a le plus marqué, ou quelle situation ?
KK : Quand on me révèle des faits de violence sexuelle arrivés depuis peu, et je suis le premier à savoir, c’est dur. Ca me marque toujours. Il y a un aussi un patient qui m’a marqué, un monsieur, qui a plus de 70 ans maintenant, enseignant et homosexuel, qui n’a jamais pu vivre sa vie librement heureux, parce qu’il a toujours du cacher son homosexualité. Je trouve ça injuste : l’homophobie de la société l’a empêché de vivre l’amour. Il a eu des rapports sexuels, mais il n’a jamais pu être amoureux ou être aimé.
C’est quoi les violences sexuelles ?
KK : C’est des rapports non-désirés. Si c’est un viol, ça tombe sous le coup de la justice, la loi est claire. Ca va en justice et s’il y a des éléments pour juger ce sera jugé. Il peut aussi y avoir des rapports non consentis, c’est-à-dire des rapports où on ne dit pas non clairement, où on laisse faire les choses. On n’en a pas très envie mais on fait quand même, pour l’autre. Parfois après on réalise que c’était une violence sexuelle parce que ça laisse une douleur, une souffrance. Soit une souffrance psychologique, soit une souffrance corporelle, c’est-à-dire qu’à un moment le corps dit stop.
Est-ce que ça fait mal pour un homme quand on « se chauffe », sans aller au bout ?
KK : Oui ça fait mal, mais c’est une douleur supportable. Quand il y a une tension sexuelle, du désir, on va amorcer l’éjaculation et si ça ne va pas au bout on peut ressentir une sorte de frustration corporelle et une douleur testiculaire. Cette douleur donne l’impression qu’il faut absolument purger la tension, s’en débarrasser. Il suffit de se masturber et ça disparaitra.
Comment faire pour éjaculer moins vite, tenir plus longtemps ?
KK : Ne pas y penser ! Si on porte une attention à son éjaculation, au lieu de la retenir ça ne fait que la convoquer. Le but d’un rapport sexuel n’est pas d’éjaculer moins vite, c’est de passer un bon moment ensemble. La sexualité n’est pas le lieu de la performance, mais le lieu du plaisir. Pour avoir du plaisir, tout le corps est concerné, pas seulement un pénis ou un vagin. La sexualité c’est parler, sentir, goûter, écouter, se sentir, être écouté, être goûté, être caressé. On peut faire plein de choses.
Si on couche avec plusieurs personnes en même temps a-t-on plus de risques d’attraper des IST ?
KK : Oui. Si on a un seul partenaire sexuel à la fois il y a un risque avec cette personne là, s’il y a trois partenaires il y a plus de risque, parce qu’ils sont trois. Si on a un seul partenaire pour la vie il n’y a aucun risque et si on a plusieurs partenaires successifs – ce qui est le cas pour la plupart des gens-, ces partenaires-là ont eu eux-mêmes d’autres partenaires. Ca fait une chaine de transmission. Plus il y a d’éléments dans cette chaine, plus il y a de risque.
Deux garçons peuvent-ils se transmettre des IST ?
KK : Oui, deux garçons, deux filles, une fille et un garçon… Les IST se fichent du genre, masculin ou féminin, de l’orientation sexuelle, de la religion, de la couleur de peau ou de l’âge. On est tous égaux la dessus.
Avez-vous attrapé une IST à cause de votre boulot ?
KK : Jamais non, parce que les IST ne sont que sexuellement transmissibles et quand on est sexologue il y a une éthique. On n’a pas de rapports sexuels avec les consultants et consultantes. Sans relation sexuelle, pas de transmission : on n’attrape pas une IST en allant aux toilettes, ni en serrant la main.
Pour vous s’il y a une chose importante à retenir c’est quoi ?
KK : C’est que dans l’amour et la sexualité, il faut être libre : se sentir soi-même libre et, quand on désire quelqu’un, vouloir que l’autre soit libre aussi, de nous désirer ou pas.
*CeGIDD : Centre gratuit d'information, de dépistage et de diagnostic des infections par les virus de l'immunodéficience humaine, des hépatites virales et des infections sexuellement transmissibles. CeGIDD de Vienne (38) : https://www.sante.fr/cegidd-vienne Tel : 04 81 34 00 50 Adresse : 10 rue Albert Thomas - Immeuble Le Fié - 38200 Vienne en complément : Département de l'Isère / Santé : https://www.isere.fr/sante#ist
Les principales IST
- Chlamydiose
- Gonorrhée
- Hépatite B
- Herpès
- HPV (papillomavirus)
- Syphilis
- VIH